Enfants et mineur·e·s non accompagné·e·s

Population

En 2019, on estimait à 40 000 le nombre de mineur·e·s non-accompagné·e·s pris·e·s en charge par les départements, dont seulement 17 000 ont été confié·e·s à l’Aide sociale à l’enfance (ASE) et moins de 1000 ont déposé une demande d’asile. Ces dernier·ère·s viennent principalement d’Afrique du Nord, d’Europe de l’Est, d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale.

En 2020, le Comede a soigné et accompagné 868 enfants mineurs, dont 134 ont été pris en charge au Centre de santé, 448 dans le cadre des permanences téléphoniques et 286 dans d’autres lieux d’accueil. Ces enfants sont en majorité des garçons (32% de filles au CDS), âgés de 14 ans en moyenne et sont récemment arrivés en France (1 an en moyenne). La plupart de ces enfants ont été scolarisés dans leur pays d’origine (primaire 41%, secondaire 31%), et 16% déclaraient y avoir travaillé, notamment dans l’agriculture ou le commerce.

État de santé

Les enfants et les MNA sont une population très fragile. À titre d’exemple, 50% des appels à propos de mineur·e·s lors des permanences téléphoniques concernaient des enfants atteints de maladies graves.

Par ailleurs, ces jeunes multiplient les facteurs de vulnérabilité qui nuisent davantage à leur état de santé. Par exemple, en 2017, 33% des enfants mineurs pris en charge par le CDS et 20% des enfants pris en charge via les permanences téléphoniques n’avaient pas d’hébergement. 28% d’entre eux ne peuvent pas communiquer en français ou en anglais, 17% n’ont pas mangé pendant les jours précédents la consultations et plus de la moitié n’a pas de protection maladie (61% CDS et 51% PT). Ces facteurs de vulnérabilité sont d’ailleurs d’autant plus importants lorsqu’il s’agit de mineur·e·s déclaré·e·s « majeur·e·s », exclu·e·s de la protection et de l’Aide sociale à l’enfance.

Sur le plan épidémiologique, les enfants mineurs sont principalement atteints d’infection chronique par le VHB (taux global 66‰, plus élevé parmi les jeunes d’Afrique de l’Ouest), la schistosomose urinaire est fréquente parmi les jeunes originaires d’Afrique de l’Ouest (taux global 58, Mali 90), ainsi que l’anguillulose parmi les Indien·ne·s (50). Enfin, la drépanocytose homozygote n’est pas rare chez les jeunes originaires d’Afrique centrale (17).

Concernant la santé mentale, ces jeunes sont très affecté·e·s par les psychotraumatismes, les troubles dépressifs et les troubles réactionnels aux facteurs de stress. En effet, leur parcours difficile et l’extrême précarité à laquelle ils font face, nécessitent de mobiliser toutes leurs ressources psychiques pour survivre au quotidien, renforçant ainsi leur fragilité. La pandémie de Covid-19, accompagnée des multiples restrictions sanitaires, a aggravé les troubles psychiques des MNA qui se sont retrouvé·e·s exclu·e·s de la société et coupé·e·s des points de distributions alimentaires. 30% des jeunes suivi·e·s par MSF et le Comede ont vu leur symptomatologie liée à des troubles psychiques se redéployer et être majorée au cours du confinement. Aussi, 79% des MNA ont fait été de leur anxiété par rapport à leurs démarches administratives et juridiques mises en pause pendant le confinement.Pour plus d’informations, consultez le rapport sur l’accompagnement psychologique des MNA. 

En  2017, Médecins sans Frontières, en collaboration avec le Comede, a ouvert un centre d’accueil et d’orientation de jour à Pantin afin d’apporter une aide adaptée aux MNA. Ce centre fournit un soutien médical, psychologique, juridique et social à des mineur·e·s non-accompagné·e·s dont la minorité n’a pas été reconnue.

Accueil prioritaire

Au Centre de santé, les enfants et les MNA bénéficient d’un accueil prioritaire. Un bilan de santé est proposé lors d’un premier rendez-vous avec le ou la mineur·e qui peut être accompagné·e d’un·e interprète professionnel·le si nécessaire.

Ledit bilan de santé facilite la prévention, le dépistage et les soins de diverses affections graves ou potentiellement graves. Il comprend un examen clinique, incluant un entretien et un repérage de troubles psychiques, ainsi que des examens complémentaires réalisés par les laboratoires intervenant pour la Dases de la Ville de Paris, partenaire conventionnelle du Comede depuis 1984. Il consiste en des prélèvements sanguins (NFS-plaquettes, sérologies du VHB, du VHC, du VIH, de la syphilis, des anguilluloses et des schistosomioses), une radiographie pulmonaire accompagnée ou non d’un quantiféron, et des examens parasitologiques des selles et des urines ainsi qu’une bandelette urinaire.

Une seconde consultation médicale est ensuite planifiée avec le/la référent·e socio-éducatif de l’ASE afin de remettre au/à la mineur·e les résultats de ses examens. C’est à la fois un temps d’éducation à la santé et l’occasion de débuter les vaccinations nécessaires. Outre le dépistage de maladies graves, le bilan de santé permet également de retrouver et de traiter des affections bénignes et fréquentes (anémies, parasitoses intestinales…), d’aborder les questions de sexualité, de prévention des IST, de contraception et d’addictions. Un bilan dentaire et ophtalmologique est également prescrit. Près de la moitié des consultations médicales conduisent à la délivrance de médicaments par la pharmacie du Comede dans l’attente de l’ouverture des droits à une protection maladie intégrale. Selon les besoins, le/la médecin peut également solliciter l’intervention des autres professionnel·le·s du Centre de santé (psychothérapeutes, assistant·e·s social·e·s, éducation thérapeutique, ostéopathie).

Ensuite, un projet de soins est proposé aux jeunes patient·e·s en coordination avec les projets d’encadrement socio-éducatif. Certain·e·s mineur·e·s sont susceptibles d’être accueilli·e·s dans des foyers ou dans des familles d’accueil sur l’ensemble du territoire, la liaison avec un·e médecin de proximité est donc importante pour assurer la continuité des soins.

 

 

Victimes du soupçon

Les causes de l’exil sont multiples, mais tou·te·s ces mineur·e·s ont quitté une situation familiale fragile en conséquence d’une guerre, de conflits intra-familiaux, de difficultés économiques… Chez ces très jeunes exilé·e·s, la protection en tant que réfugié·e·s se double de la nécessité de protection de l’enfance. Néanmoins, une partie d’entre eux/elles sont soupçonné·e·s par les services spécialisés de ne pas donner leur âge véritable, et peuvent voir leur minorité contestée par la pratique d’une expertise médicale fondée sur des bases scientifiques très discutées, même lorsqu’ils disposent d’une pièce d’état civil.

À l’instar du Comede, plusieurs collectifs (ADJIE, MIE) déplorent l’exclusion d’une partie des mineur·e·s isolé·e·s étranger·e·s et des dysfonctionnements des services de « l’enfance », en dépit de la circulaire Taubira du 31 mai 2013. Plus grave encore, la proposition de loi, adoptée au Parlement en 2015, complétant la législation de 2007 sur la protection de l’enfance, fait l’impasse sur la question de l’évaluation préalable à l’entrée dans le dispositif de protection, qui conduit actuellement à laisser à la rue plus d’un·e jeune sur deux.